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mardi, 24 avril 2012

Joseph Epstein, la vie assassinée

JOSEPH EPSTEIN, LA VIE ASSASSINÉE

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Joseph Epstein, camp de Gurs, été 1939. DR


« Le 16 novembre 1943, Joseph Epstein avait rendez-vous avec Manouchian à Ivry. Il est possible qu’ils aient été suivis, ou que leur lieu de rendez-vous ait été connu. C’est là que tous deux furent arrêtés. Ils étaient armés, mais n’eurent pas le temps de se défendre. Ils étaient complètement encerclés. L’instruction fut menée avec sadisme. On revêtit Joseph d’un masque de cuir si serré qu’il fit de son visage une masse sanglante. Il fut torturé pendant trois mois. Béranger, qui lui rendit visite après le procès à la prison de Fresnes, eut du mal à le reconnaître.


« Mais Epstein s’était tu. Ses bourreaux ne purent pas même obtenir de lui son véritable nom. Les services de renseignements de la Résistance transmirent une lettre à Henri Giron. Elle contenait un autre message sur papier à cigarette. Epstein y demandait de lui fournir une scie pour les barreaux. Cette mission fut confiée à Marguerite Monino, une mission vraiment périlleuse pour une mère de deux enfants. Elle se procura une petite scie à métaux, et son voisin, cordonnier rue Saint-André-des-Arts, la camoufla dans une semelle. Mais quand on put la transmettre à Epstein, en prison, il était déjà trop tard…


« Les policiers hitlériens et leurs collaborateurs français triomphèrent après l’arrestation d’Epstein et de Manouchian, et de dizaines d’autres combattants, à Paris et dans la banlieue. Aucun d’eux, malgré des tortures longues et atroces appliquées avec un raffinement cruel, ne s’est laissé briser. Les tortionnaires ne purent même pas établir la véritable identité d’Epstein, ni son origine. Ils ne réussirent pas à obtenir des précisions qui auraient permis de monter un procès public à grand spectacle, servant la propagande nazie. Epstein ne figure pas sur la célèbre affiche rouge qui dénonçait la Résistance comme une armée du crime composée d’étrangers et d’apatrides…


« Le procès de l’Hôtel Continental [rue de Rivoli], avec toute la presse hitlérienne et les journalistes venus des pays occupés, avait pour but de montrer que la Résistance, en France, n’était qu’une bande criminelle composée d’étrangers et de Juifs. Les trois Français [Witchitz, Rouxel, Cloarec] qui se trouvaient au banc des accusés devaient apparaître comme de jeunes arriérés, malheureusement entraînés par les Juifs, responsables des souffrances de tant d’“honnêtes” Français… »


Extrait, Joseph Epstein, Colonel Gilles, de Zamosc en Pologne au Mont Valérien, 1911-1944

Moshé Zalcman

 

Joseph Epstein sera fusillé le 11 avril 1944 avec 21 de ses camarades : Jean Alezard, Emmanuel Bourneuf, Roger Brunel, Roland Cauchy, Florentin Clotrier, Maurice Corcuff, André Cordier, Maurice Dampierre, André Dreyer, Marcel Fouque, Robert Fouquet, Jean François, Christian Gavelle, René Guillaume, Paul Jourdheuil, André Leclerc, Marcel Maillard, Roger Martin, Gaston Michallet, Roger Richard, Camille Thibault.

(Liste établie par Jean-Pierre Ravery).


 

 

Joseph Epstein, bon pour la légende

Réalisation : Pascal Convert

Auteur : Pascal Convert

Image : Jean-Pierre Caussidery, Pascal Convert, Charlie Perez

Son : Pascal Convert, Pierre Schoeller

Montage : Fabien Beziat

Commentaire dit par Bruno Putzulu

Production : Sodaperaga, 2007.


On l’a oublié, et pourtant il fut de ceux qui comptèrent dans la Résistance. Joseph Epstein en était l’un des plus brillants cerveaux et meneurs, tacticien accompli de la guerre insurrectionnelle et "subversive". C’était aussi un homme, plein de vie et d’humour, mais dont le destin fut scellé par les dérives du 20e siècle – et pour cause : il avait le malheur d’être juif. Pascal Convert a entrepris de nous retracer la vie méconnue de ce résistant permanent, fusillé le 11 avril 1944, la biographie prenant la forme d’une lettre directement adressée au fils d’Epstein. Un film scientifiquement rigoureux et émotionnellement impliqué, une enquête sur un homme, sa pensée, son action, et son univers, celui de l’Internationale communiste, du Front populaire, de la guerre d’Espagne, de la Résistance, où l’on croisera la route de Jean Moulin, Raymond et Lucie Aubrac, Joseph Minc, Lise London, Maurice Kriegel-Valrimont, Esther Gorintin...


Bibliographie


Joseph Epstein, Colonel Gilles, de Zamosc en Pologne au Mont Valérien 1911-1944, Moshé Zalcman, Éditions La Digitale, 1984.

La Vie à en mourir, lettres de fusillés 1941-1944, préface de François Marcot, lettres choisies et présentées par Guy Krivopissko, Éditions Tallandier, Paris, 2003.

Joseph Epstein, bon pour la légende, lettre au fils, Pascal Convert, Éditions Atlantica Seguier, Biarritz, 2007.


Documentaires


La Traque de L’Affiche rouge,

Réalisation : Georges Amat et Denis Peschanski

Compagnie des Phares et Balises, 2007.


Mont Valérien, au nom des fusillés, 1940-1944.

Un film écrit et réalisé par Pascal Convert

Musique originale Bernard Lubat

MontageVéronique Lagoarde-Segot

Produit par Pierre-André Boutang et Nicolas Petitjean pour On Line Productions, 2003.

Commentaires

Très interessant, merci.

Écrit par : Biaginota | jeudi, 31 mai 2012

Réimpression aux Editions Séguier de "Joseph Epstein, bon pour la légende, lettre au fils" de Pascal Convert

http://www.editions-seguier.fr/livre/10458/Joseph_Epstein

Merci !

Écrit par : Editions Atlantica | mercredi, 06 mars 2013

Je vous applaudis pour votre exercice. c'est un vrai boulot d'écriture. Poursuivez .

Écrit par : MichelB | mercredi, 13 août 2014

Les commentaires sont fermés.