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mercredi, 15 février 2012

La presse collabo et le procès des 23

AVERTISSEMENT


Nous reproduisons ci-dessous un article paru dans "Paris-Soir", édition du 21 février 1944, relatant le procès, la parodie de procès, des 23 combattants du groupe dit « Manouchian ». La pauvreté de la syntaxe est à l’image des décombres et ordures qui jalonnent cette faconde journalistique. Il fallait que ces héros de la Résistance soient perçus et appréhendés comme des criminels, tout fut donc mis en œuvre pour les salir et cet article de Paris-Soir, presse collabo, en est une des trop nombreuses illustrations. Mais même cette volonté de salir, même la pression et la terreur qui régnaient alors n’y firent rien : "Nul ne semblait vous voir Français de préférence/Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant /Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants/Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE/Et les mornes matins en étaient différents…"


PARIS-SOIR

Lundi 21 février 1944

LE MOUVEMENT OUVRIER IMMIGRÉ*

ÉTAIT DIRIGÉ PAR DES JUIFS

Qui prenaient leurs ordres de Moscou


Et son émanation, Missak Manouchian, que juge la cour martiale allemande en compagnie de 23 autres terroristes, pour la plupart étrangers, a sur la conscience 150 assassinats.


***


[Hôtel Continental, rue de Rivoli] 9 heures, une immense salle lambrissée d’or. Sur les chaises valeurs rouges sont assis 23 hommes et une femme, entravés deux par deux par les menottes face à deux grandes flammes de guerre allemandes, qui encadrent l’aigle du Reich et un portrait du Führer. À gauche, le procureur, à droite, les défenseurs, devant les accusés, l’interprète. Tous semblables dans leurs uniformes feldgrau. De part et d’autre les journalistes allemands, français et étrangers.


Tout autour de la salle, fantassins et feld-gendarmes, mitraillette plaquée sous l’avant-bras, sont fixés en un garde-à-vous rigide.


Le président — un lieutenant-colonel — et les deux autres juges font leur entrée.


La cour martiale auprès du commandant du Grand Paris va commencer le procès d’une bande de 24 terroristes commandés par Missak Manouchian, bande qui fut arrêtée en octobre et novembre derniers.


Après avoir prêté le serment d’usage, le président rappelle qu’il s’agit de juger de dangereux bandits coupables d’actes de francs-tireurs contre les forces armées allemandes et d’attentats contre des administrations des sujets français. Il procède ensuite à l’interrogatoire d’identité des 24 inculpés. Deux seulement — Cloarec, 20 ans, et Rouxel, 18 ans — sont d’authentiques Français, parmi les 22 autres, on relève 9 Polonais, 5 Italiens, 3 Hongrois, 2 Arméniens, 1 Espagnol, une Roumaine et deux apatrides. Dix de ces étrangers sont Juifs.


L’enquête a révélé qu’à partir de 1919, les communistes étrangers, réfugiés politiques,  se groupèrent en France au sein du mouvement ouvrier immigré (M.O.I.)* dirigé par des Juifs et qui prenait ses directives à Moscou. Cet organisme, devenu clandestin après la guerre, devint en 1941 un groupe terroriste parallèle aux francs-tireurs partisans et destiné à leur servir de modèle. Ce groupe, organisé militairement, était dirigé par l’accusé Manouchian.


Manouchian, l’homme aux 150 assassinats. — C’est par cet inculpé que commencent les interrogatoires. Ce « super-patriote » né en Turquie, en 1906, a fait la guerre de 1939…, comme affecté spécial ! Depuis juillet 1943, il est « responsable politique » d’un détachement de l’organisme clandestin. Il devint ensuite « responsable militaire » d’une unité comprenant plusieurs détachements et un groupe de « tueurs ». C’est lui qui transmet les ordres, administre les stocks d’explosifs et d’armes, fait exécuter les reconnaissances et dirige les 52 attentats dont le tribunal va s’occuper. Il est donc responsable de 150 morts et de 600 blessés graves.


Ce garçon basané, au regard fuyant, ne manque pas d’intelligence. Il reconnaît les faits avec un cynisme déconcertant. Le président lui demande les détails précis sur l’organisation intérieure. Il répond : « Un détachement était composé des dérailleurs et un groupe spécial se chargeait des meurtres difficiles… »


On examine ensuite un attentat particulièrement hardi, puisque perpétré dans la rue Lafayette, à midi. Il s’agissait de voler une valise contenant de l’argent à deux officiers sortant d’un restaurant. C’est un de ces détachements qui fut chargé de ce « travail ».


Le Polonais Witchitz et l’Italien Della Negra abattirent les hommes à coups de révolver et furent appréhendés…


Golda Bancic a porté des grenades à un complice pour les faire jeter sur un camion rempli d’Allemands et sur un Français dont les opinions politiques ne lui plaisaient pas. 


Elle parle d’une voix très douce. Ses mots ne sont que des murmures légers qui n’apportent rien de nouveau sur cette égérie du terrorisme.


Le comique de la troupe. — Enfin, comme dans tout procès criminel. Il y a un comique. C’est un Polonais grassouillet, au visage porcin, aux yeux éblouis de stupidité. Que vient-il faire parmi ces redoutables assassins, lui, assassin honoraire, si l’on peut dire ? Il a voulu attaquer des paysans de Seine-et-Oise, chez eux pour se faire du numéraire :


Moi, pas dangereux. Moi, simplement demander à eux quarante mille francs, eux dire à moi pas avoir quarante mille francs !


Il a l’air très malheureux ; quarante mille francs, pour lui, c’est le pactole, c’est quelque chose d’irrésistiblement beau. Mais les paysans jugent aussi que c’est assez précieux. Le pauvre Kabasky n’en revient pas.


La gendarmerie l’a cueilli facilement.


Un être de cette catégorie, avec cette veulerie et ses absurdes bafouillages, semble [être] quelqu’un d’à peu près convenable à côté des hommes qui l’entourent.


* (M.O.I.) il s’agit bien-sûr de la Main-d’Œuvre Immigrée et non du mouvement ouvrier immigré, on trouve aussi parfois Mouvement Ouvrier International pour la même abréviation, cela n’est pas anodin.