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Olga (Golda) Bancic

GOLDA BANCIC
 
 
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(Chargée du transport d'armes, elle a participé à une centaine d'attaques contre l'armée d'occupation. Déportée, elle fut guillotinée dans la cour de la prison de Stuttgart, le 10 mai 1944, le jour de son trente-deuxième anniversaire.)

16 novembre 1943
Pierre Gautherie *
(commissaire)

 

Constatons que les inspecteurs Blanchin, Candas, Gourjon, Amigou, Brandy et Schultz mettent à notre disposition la nommée
Bancic Golda, née le 28 mai 1912 à chizineau (Roumanie), de Noé et de Zeains Marie, célibataire, un enfant, de nationalité roumaine et de race juive, sans profession, sans domicile connu.

Arrêtée ce jour, à 13 h 30, rue du Docteur-Paul-Brousse (Paris 17e), dans les circonstances énoncées au rapport ci-joint, alors qu’elle se trouvait en compagnie du nommé Rajman Marcel dit « Michel », membre de l’équipe spéciale des FTP.

Fouillée lors de son arrestation, par une personne de son sexe, elle a été trouvée porteur d’une fausse carte d’identité au nom de Lebon née Petresca Marie.

La femme Bancic fait l’objet aux archives centrales de notre direction d’un dossier n° D.117.587 où l’on trouve un rapport de renseignements en date du 15 décembre 1941, relatif à l’évasion de son amant le nommé Salomon Jacob de l’hôpital Tenon, le 23 novembre 1941.

Elle est inconnue aux archives de la police judiciaire.

Son nom n’est pas noté aux sommiers judiciaires.

Nous procédons à son interrogatoire par acte subséquent.

Le commissaire de police.

Interpellée verbalement lors dès son arrivée à notre service, la femme Bancic a reconnu après de nombreuses réticences être domiciliée 114, rue du Château-d’Eau.

Le commissaire de police

 

16 novembre 1943

Interrogatoire de Golda Bancic (Extraits)

….je me nomme Golda Bancic née le 28 mai 1912 à chizineau (Roumanie), de Noé et de Zeains Marie, célibataire, un enfant.
Je suis de nationalité roumaine et de race juive.
Je suis démunie de pièce d’identité d’étranger.
Je suis domiciliée 114, rue du Château à Paris 14.
Je sais lire et écrire le français.

Sur les faits :

Je suis arrivée en France en 1938, venant de Chisineau. J’avais l’intention de suivre mes études à la faculté de lettres où j’étais inscrite quelques jours après mon arrivée jusqu’à la déclaration de guerre.

J’ai retrouvé à Paris un de mes compatriote que j’avais connu en Roumanie. J’ai vécu avec lui maritalement 2 cité Popincourt, puis 60, rue Saint-Sabin.

Mon ami s’appelle Jacob Salomon, il a été arrêté en septembre 1941, je crois, en temps que juif roumain et interné à Drancy. J’ignore ce qu’il est devenu.

En avril 1943, je suis venue habiter 114, rue du Château à Paris. Pour subvenir à mes besoins je faisais des ménages.

En juillet 1943, une personne dont je n’ai jamais connu le nom, m’a demandé de travailler pour une organisation communiste. J’ai accepté. Elle m’a alors présenté à un homme avec qui j’ai toujours travaillé. Je me refuse à vous donner le pseudonyme de cet homme, du reste je ne m’en souviens plus.

J’ai pris le pseudonyme de Pierrette, je ne sais pas le numéro matricule qui m’avait été affecté, j’ignore à quel détachement j’appartenais.

Les premiers temps, l’homme avec qui je travaillais m’a passé quatre pistolets et quatre grenades que j’ai entreposés chez moi.

Mon rôle consistait à porter les armes sur les lieux ou plutôt à proximité des lieux  d’opération. Après l’opération les camarades me rendaient les armes que je rapportais chez moi.

J’ai effectué ce travail quatre ou cinq fois. Je ne me souviens plus à quels endroits je me suis rendue ni de quelles opérations il s’agissait.

Les derniers temps je n’ai pas repris les armes chez moi celles-ci sont restées aux mains de mes camarades. Je n’ai plus de matériel chez moi.

A l’issue d’une de ces opérations, j’ai appris qu’un camarade appelé « André » avait été blessé accidentellement. Je sais que ce camarade a été soigné par des docteurs n’appartenant pas à notre organisation. J’ignore le nom et l’adresse de ces docteurs.

S.I. Je touchais de l’organisation 2 300 francs par mois, ainsi que des titres de ravitaillement.

La carte d’identité qui a été découverte sur moi au moment de mon arrestation, m’avait été remise par un membre de l’organisation dont j’ignore le pseudonyme.

N.S.I. au moment de mon arrestation, j’étais en compagnie d’un individu que je voyais pour la première fois. Je m’étais rendu à ce rendez-vous sur instruction. J’ignore ce que me voulait cet homme. Je n’ai aucune idée de l’objet de ce rendez-vous. Il s’agit bien de l’individu dont vous me représentez la photographie et que vous me dites s’appeler RAYMAN (« Michel »). Il y avait un autre homme à ce rendez-vous, mais je n’y ai pas prêté attention, je ne l’avais jamais vu.

* Après le déménagement de la BS2 au deuxième étage, galerie sud (préfecture de police), avec la BS1, ce sont les salles 33, 35, 36 et 38 qui serviront aux interrogatoires. Il semble dès lors que la proximité des lieux ait amené des inspecteurs désœuvrés ou disponibles dans des locaux communs aux deux BS à participer indifféremment aux brutalités contre des prévenus, quelle que soit la brigade ou le groupe concernés. A partir de l’automne 1943, à la suite des menaces de la radio anglaise et des risques de délation de collègues qui réprouvent ces méthodes, les séances se déroulèrent dans le propre bureau du commissaire Gautherie, à l’abri des regards et des témoins.

Cette note figure à la page 442 de l’excellent ouvrage Liquider les traîtres la face cachée du PCF 1941-1943, Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre, Éditions Robert Laffont, Paris, septembre 2007.
 
Nota : Merci de nous communiquer toutes les informations concernant Olga Bancic, qui seraient en votre possession, suceptibles de mieux faire connaître cette martyre de la Résistance.

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dimanche, 06 janvier 2008 | Lien permanent | Commentaires (3)

Le 21 février 1944

... Au moment de mourir, je proclame que je n'ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu'il méritera comme châtiment et comme récompense ... Je mourrai avec 23 camarades tout à l'heure avec le courage et la sérénité d'un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n'ai fait [de] mal à personne et, si je l'ai fait, je l'ai fait sans haine. Aujourd'hui, il y a du soleil ...

Extrait de la lettre de Missak Manouchian adressée à sa femme Mélinée, le 21 février 1944, avant d'être exécuté.

LA VIE À EN MOURIR

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Missak Manouchian

Josef Wolf Boczov

Celestino Alfonso

Marcel Mieczeslaw Rajman

Spartaco Fontano

Jonas Geduldig-Michael Martiniuk

Tamas Elek

Emeric Glasz

Willy Szapiro

Moysze Fingercwaig

Wolf Wajsbrot

Robert Witchitz

Roger Rouxel

Georges Cloarec

Stanislas Kubacki

Arpen Levitian-Armenek Manukian

Lejb Goldberg

Amedeo Usseglio Polatera

Cesare Luccarini

Rino Della Negra

Antonio Salvadori

Szlama Grzywacz

Olga (Golda) Bancic

Tous ont été fusillés, le 21 février 1944, au Mont Valérien.


Golda (Olga) Bancic, transférée en Allemagne, a été décapitée à la hache, à Stuttgart, le 10 mai 1944 (date de son anniversaire).
Joseph Epstein (Colonel Gilles), arrêté au rendez-vous du 16 novembre 1943 avec Manouchian, a été fusillé, après avoir été atrocement torturé sans jamais avoir parlé, le 25 avril 1944 avec vingt-neuf autres résistants.
Quarante autres résistants, juifs pour la plupart, ont été déportés.

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dimanche, 20 février 2011 | Lien permanent | Commentaires (3)

La presse collabo et le procès des 23

AVERTISSEMENT


Nous reproduisons ci-dessous un article paru dans "Paris-Soir", édition du 21 février 1944, relatant le procès, la parodie de procès, des 23 combattants du groupe dit « Manouchian ». La pauvreté de la syntaxe est à l’image des décombres et ordures qui jalonnent cette faconde journalistique. Il fallait que ces héros de la Résistance soient perçus et appréhendés comme des criminels, tout fut donc mis en œuvre pour les salir et cet article de Paris-Soir, presse collabo, en est une des trop nombreuses illustrations. Mais même cette volonté de salir, même la pression et la terreur qui régnaient alors n’y firent rien : "Nul ne semblait vous voir Français de préférence/Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant /Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants/Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE/Et les mornes matins en étaient différents…"


PARIS-SOIR

Lundi 21 février 1944

LE MOUVEMENT OUVRIER IMMIGRÉ*

ÉTAIT DIRIGÉ PAR DES JUIFS

Qui prenaient leurs ordres de Moscou


Et son émanation, Missak Manouchian, que juge la cour martiale allemande en compagnie de 23 autres terroristes, pour la plupart étrangers, a sur la conscience 150 assassinats.


***


[Hôtel Continental, rue de Rivoli] 9 heures, une immense salle lambrissée d’or. Sur les chaises valeurs rouges sont assis 23 hommes et une femme, entravés deux par deux par les menottes face à deux grandes flammes de guerre allemandes, qui encadrent l’aigle du Reich et un portrait du Führer. À gauche, le procureur, à droite, les défenseurs, devant les accusés, l’interprète. Tous semblables dans leurs uniformes feldgrau. De part et d’autre les journalistes allemands, français et étrangers.


Tout autour de la salle, fantassins et feld-gendarmes, mitraillette plaquée sous l’avant-bras, sont fixés en un garde-à-vous rigide.


Le président — un lieutenant-colonel — et les deux autres juges font leur entrée.


La cour martiale auprès du commandant du Grand Paris va commencer le procès d’une bande de 24 terroristes commandés par Missak Manouchian, bande qui fut arrêtée en octobre et novembre derniers.


Après avoir prêté le serment d’usage, le président rappelle qu’il s’agit de juger de dangereux bandits coupables d’actes de francs-tireurs contre les forces armées allemandes et d’attentats contre des administrations des sujets français. Il procède ensuite à l’interrogatoire d’identité des 24 inculpés. Deux seulement — Cloarec, 20 ans, et Rouxel, 18 ans — sont d’authentiques Français, parmi les 22 autres, on relève 9 Polonais, 5 Italiens, 3 Hongrois, 2 Arméniens, 1 Espagnol, une Roumaine et deux apatrides. Dix de ces étrangers sont Juifs.


L’enquête a révélé qu’à partir de 1919, les communistes étrangers, réfugiés politiques,  se groupèrent en France au sein du mouvement ouvrier immigré (M.O.I.)* dirigé par des Juifs et qui prenait ses directives à Moscou. Cet organisme, devenu clandestin après la guerre, devint en 1941 un groupe terroriste parallèle aux francs-tireurs partisans et destiné à leur servir de modèle. Ce groupe, organisé militairement, était dirigé par l’accusé Manouchian.


Manouchian, l’homme aux 150 assassinats. — C’est par cet inculpé que commencent les interrogatoires. Ce « super-patriote » né en Turquie, en 1906, a fait la guerre de 1939…, comme affecté spécial ! Depuis juillet 1943, il est « responsable politique » d’un détachement de l’organisme clandestin. Il devint ensuite « responsable militaire » d’une unité comprenant plusieurs détachements et un groupe de « tueurs ». C’est lui qui transmet les ordres, administre les stocks d’explosifs et d’armes, fait exécuter les reconnaissances et dirige les 52 attentats dont le tribunal va s’occuper. Il est donc responsable de 150 morts et de 600 blessés graves.


Ce garçon basané, au regard fuyant, ne manque pas d’intelligence. Il reconnaît les faits avec un cynisme déconcertant. Le président lui demande les détails précis sur l’organisation intérieure. Il répond : « Un détachement était composé des dérailleurs et un groupe spécial se chargeait des meurtres difficiles… »


On examine ensuite un attentat particulièrement hardi, puisque perpétré dans la rue Lafayette, à midi. Il s’agissait de voler une valise contenant de l’argent à deux officiers sortant d’un restaurant. C’est un de ces détachements qui fut chargé de ce « travail ».


Le Polonais Witchitz et l’Italien Della Negra abattirent les hommes à coups de révolver et furent appréhendés…


Golda Bancic a porté des grenades à un complice pour les faire jeter sur un camion rempli d’Allemands et sur un Français dont les opinions politiques ne lui plaisaient pas. 


Elle parle d’une voix très douce. Ses mots ne sont que des murmures légers qui n’apportent rien de nouveau sur cette égérie du terrorisme.


Le comique de la troupe. — Enfin, comme dans tout procès criminel. Il y a un comique. C’est un Polonais grassouillet, au visage porcin, aux yeux éblouis de stupidité. Que vient-il faire parmi ces redoutables assassins, lui, assassin honoraire, si l’on peut dire ? Il a voulu attaquer des paysans de Seine-et-Oise, chez eux pour se faire du numéraire :


Moi, pas dangereux. Moi, simplement demander à eux quarante mille francs, eux dire à moi pas avoir quarante mille francs !


Il a l’air très malheureux ; quarante mille francs, pour lui, c’est le pactole, c’est quelque chose d’irrésistiblement beau. Mais les paysans jugent aussi que c’est assez précieux. Le pauvre Kabasky n’en revient pas.


La gendarmerie l’a cueilli facilement.


Un être de cette catégorie, avec cette veulerie et ses absurdes bafouillages, semble [être] quelqu’un d’à peu près convenable à côté des hommes qui l’entourent.


* (M.O.I.) il s’agit bien-sûr de la Main-d’Œuvre Immigrée et non du mouvement ouvrier immigré, on trouve aussi parfois Mouvement Ouvrier International pour la même abréviation, cela n’est pas anodin.


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mercredi, 15 février 2012 | Lien permanent | Commentaires (2)

La presse collabo et le procès des 23 (suite)

AVERTISSEMENT

 

Il s’agit d’un article paru dans "Aujourd’hui", journal collaborationniste, comme chacun l’aura bien compris. Il est évident que les comportements décrits, les propos rapportés dans cet article, ainsi que dans tous les autres organes de presse qui ont accepté la honte de la collaboration, relèvent de la pure invention, de la pire calomnie, une production de quelques journalistes miteux qui étaient sans doute payé plus de 2 200 francs. Comme décliné précédemment, le seul but était de salir la lutte héroïque de ces combattants. Nous appelons donc nos lecteurs à la plus grande vigilance quant à l’interprétation qui pourrait être faite de ces articles. Le négationnisme est une arme redoutable pour les ennemis de la liberté.


AUJOURD’HUI

(Journal collaborationniste)

Fondé en août 1940

Édition du 21 février 1944

 

L’Équipe des « dérailleurs » devant la Cour martiale allemande

 

***

 

Son chef Boczor est l’auteur  de 21 attentats* contre les voies ferrées.

 

Il s’appelle Joseph Boczor [parfois orthographié Boczov]. Il est né à Felsabanya (Hongrie) en 1905 [le 3 août]. Il se dit appartenant à la religion réformée. Voire… Son visage est celui d’un sémite cent pour cent. Une nuque maigre, un occiput développé, et ses cheveux de nihiliste qui, comme chez Rajman, sont rejetés en arrière « à l’artiste ». Autant de marques de fabrique…

 

Il a l’air très étonné qu’on lui reproche ses actes. Rien ne lui semble, en effet, plus naturel que de gêner la circulation des chemins de fer dans un pays qui est occupé par la Wehrmacht. Naturellement, il ne sait pas qui lui a remis, ainsi qu’à ses hommes, les « clefs anglaises » (quelle coïncidence !) et les crochets nécessaires au déboulonnage des rails. Il suffit d’avoir vu des cheminots travailleurs de la voie porter un rail pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’une opération de tout repos. Mais Joseph Boczor a son système. Il n’en est pas peu fier car il a provoqué vingt et un déraillements.

 

La ligne Paris-Troyes semblait [être], durant l’automne dernier, son champ de manœuvre idéal. Avec Wasjbrot, Elek, Goldberg, Shapiro, Fingercweig, Usseglio et consorts, il opérait la nuit.

 

Le jeune Elek est bien curieux à observer. C’est un charmant Juif aux cheveux blonds frisotés, aux traits fins et réguliers, et mis avec une certaine élégance. Le président lui demande comment, lui, fils de bourgeois aisés, élevé dans un lycée a pu se mêler à des criminels de droit commun. Sa réponse est aussi décevante que sa présence ici.

 

—   Mes parents tenaient un restaurant. Les lois de 1940 ont fait fermer la maison. Je ne savais que faire. C’est alors qu’un de mes anciens professeurs m’a conseillé d’entrer dans le mouvement de résistance contre la Wehrmacht.

 

—   Et vous n’avez pas compris dans quel milieu vous étiez tombé ?

 

—   Si. J’ai dit que je ne voulais faire partie ni des attaques à la grenade, ni des attaques au révolver. Alors, on m’a « mis » aux déraillements.

 

—   Et vous n’avez pas pensé que vous pourriez provoquer la mort de ces Français que vous prétendez défendre contre l’envahisseur ?

 

—   Eh ! que voulez-vous ?... En temps de guerre… Il y a bien des bombardements !

 

Ainsi, ce jeune Juif, venu de Hongrie, refuse de tuer par armes à feu, mais il accepte, d’un cœur léger, de tuer par catastrophes de chemin de fer. Cela dit, on regrette que l’ancien professeur ne soit pas lié, par une solide paire de menottes, à son jeune élève…

 

***

 

Un sinistre travail de nuit.

 

Tous les dérailleurs parlent tranquillement de leur « travail de nuit », s’étendent complaisamment sur les possibilités techniques d’un bref démontage…

 

L’un d’eux, armé d’un pistolet, était chargé d’abattre les surveillants de vois ferrées… Ce pistolet fut la cause d’un malheur. Aux abords de Melun, des gendarmes fouillaient les gens, ils ont fouillé la troupe qui voulait renter à Paris par le train, en espérant sans doute que des confrères n’avaient pas imité son exemple sur le parcours qu’elle allait couvrir. La bande a été embarqué en un tournemain et la voici qui ne semble pas très fière de son équipée, sauf Boczor qui fait des discours sur les beautés de la liberté.

 

La quatrième séance est consacrée à l’interrogatoire de la juive roumaine Golda Bancic, du nommé Kubacki, au réquisitoire, aux plaidoiries et au jugement.

 

***

 

Grenades et révolvers.

 

Au cours de sa dernière séance, qui durera près de cinq heures, le tribunal examine dans leurs moindres détails les vingt et un attentas commis par un des plus fameux détachements…

 

Ce groupe, dont 7 des membres ont été appréhendés, étaient spécialisés dans le jet des grenades contre les autobus, restaurants, hôtels ou bureaux allemands et dans l’assassinat de militaires isolés et de collaborationnistes français.

 

Le tourneur italien Fontano, 22 ans, qui participa à 14 attentats, reconnaît avoir eu des attaches avec les Jeunesses communistes. Il touche pour son « travail » dans l’organisation terroriste, 2 200 francs par mois et des tickets d’alimentation volés. Comme la plupart de ses complices, il avait touché de ses chefs de faux papiers d’identité.

 

Le Polonais Witchitz, 22 ans, est devenu « tueur » pour ne pas partir travailler en Allemagne. Il lève la main sans hésitation chaque fois que le président demande pour un meurtre précis « qui a tiré ? ». Il la lèvera 16 fois…

 

Le jeune Parisien Rouxel n’a pas eu de faux papiers et a travaillé jusqu’à son arrestation. Il est l’un des rares accusés à paraître un peu abattu. Mais pas une seule fois le mot « patrie » ou le mot « France » ne vinrent à sa bouche : « Je me suis laissé entraîner » se contente t-il de murmurer.

 

Le maçon italien Salvadori, 23 ans, a eu peur d’être interné après la capitulation de Badoglio [maréchal italien]. Lui aussi, ce sont les faux papiers qui l’ont attiré… La roue tourne : il prend part à deux attentats.

 

Georges Cloarec était engagé dans la marine, démobilisé, il rencontre un homme qui lui procura également des faux papiers. En 1943, il est définitivement franc-tireur et sert de guetteur dans trois attentats.

 

Le cimentier italien Luccarini, 22 ans, a appartenu au Parti communiste clandestin dès 1940. Il est condamné à deux ans de prison par la cour d’assises de Douai pour distribution de tracts marxistes, s’évade, revient à Paris et rejoint lui aussi les rangs des francs-tireurs. Par six fois, il participe à des assassinats ou à des actes de sabotage.

 

Della Negra a 20 ans. Il aimait le football et voulait devenir professionnel… Pour ne pas abandonner son club, il ne veut pas partir travailler en Allemagne, « s’abiboche » avec des inconnus qui s’offrent po

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dimanche, 19 février 2012 | Lien permanent

Ils étaient des nôtres !

RETOUR SUR L'AFFICHE ROUGE

AIMER LA VIE A EN MOURIR

 

Le 21 février 1944, 22 combattants des Francs-tireurs et partisans de la Main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI) étaient fusillés. La mémoire de leur participation à la Résistance est restée longtemps enfouie..., notamment dans les archives du Parti communiste français.
Il y a 60 ans, 22 résistants étaient fusillés. Parmi eux, Missak Manouchian. Le plus jeune, Thomas Elek, avait 17 ans. La seule femme, Golda Bancic, fut décapitée en mai. Le colonel-président du « procès » affirmait alors : « La police française a fait preuve d'un grand dévouement. » Il faisait référence, en l’occurrence, à l’une des brigades spéciales des renseignements généraux qui les arrêta après de multiples attaques de convois militaires et de colonnes de troupes, hold-up, sabotages, attentats (entre autres contre le commandant du Grand Paris et le responsable du Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne. Sur les 80 combattants des Francs-tireurs et partisans de la Main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI) actifs en région parisienne entre juin et novembre 1943 — auxquels appartenait le groupe —, huit seulement n’ont pas été arrêtés ou tués. Il ne restait alors, dans la région, déjà plus beaucoup d’autres FTP, suite à la répression et au départ au maquis des jeunes requis par le STO. Il aura fallu du temps avant que cette épopée ne figure dans les manuels du secondaire ; comme celle de l’affiche des occupants — placardée à 15 000 exemplaires — dénonçant « l’armée du crime’, baptisée bien plus tard « L'Affiche rouge », dans un poème d’Aragon chanté par Léo Ferré.Le « procès » avait été monté pour alimenter la xénophobie et l’antisémitisme du régime de Vichy. La Résistance était ainsi le fait d’une « tourbe internationale » (Le Matin), de « terroristes judéo-communistes » (Paris-soir), « l’activité d'étrangers et de Juifs abusant de l’hospitalité française pour créer le désordre dans le pays qui les a recueillis », et dont « le but est l’avènement du bolchevisme international » (1). Internationalistes effectivement, ces Arméniens, Espagnols, Italiens, Hongrois, Polonais, Roumains, dont les familles avaient été souvent exterminées, combattants antifascistes dans leur pays ou/et dans les Brigades internationales de la Révolution espagnole. Beaucoup étaient communistes, bien sûr. Et nombreux étaient Juifs...

« Vous étiez fait pour la lutte armée ? Je ne crois pas, j'étais normal. »

(interview de Raymond, ex-FTP-MOI, par Mosco).


Du côté de la résistance gaulliste, Radio Londres n’y fait allusion que deux mois après : il faut se méfier des fausses nouvelles allemandes, les résistants sont avant tout des fonctionnaires, de simples citoyens, des anciens de Verdun. Le Conseil national de la résistance (CNR) va d’ailleurs s’inquiéter de « l’activité des mouvements étrangers sur le territoire français », qui « doit s’interdire toute attitude susceptible de compromettre l’unité ». Dans l’édition du Larousse en trois volumes de 1966, Missak Manouchian est absent. Et il faudra attendre le 40e anniversaire pour un hommage officiel, enfin, mais limité aux Arméniens. Le ministère des Anciens Combattants appose des croix sur les tombes de combattants juifs tout autant ignorés par les instances communautaires. Pour le PCF, les actes sont plus facilement revendiqués que les personnes, ces résistants cosmopolites font tache dans le tricolore. De même qu’on passera longtemps sous silence le « travail allemand », dont le responsable était Arthur London et qui n’a pas été le monopole de ceux auquel il a valu l’épithète d’« hitléro-trotskystes ». Officiellement, c’était « A chacun son boche ! » (titre de l’Huma en 1944). Tant pis si, sous l’uniforme, il y avait un travailleur, parfois un communiste... L’heure était au Front national (créé par le PCF comme organisation « large » des FTP, bientôt FTPF, avec un « F » comme Français, dont le journal s’appelait France d’abord !). « Il fallait pouvoir chanter La Marseillaise sans accent ! » (2). André Marty, au bureau politique du PCF, parle à la Libération de « chasser tous les “ski” des directions du parti » (3). A la tête de la MOI, il n’y avait plus que des Français. A Claude Lévy, qui écrit un livre sur son bataillon, Aragon, poète et éditeur, demande de « changer les noms. On ne peut tout de même pas laisser croire que la Résistance française a été faite par des étrangers ». Le 1er mars 1944, d’ailleurs, l’Huma avait consacré 15 lignes à l’exécution du groupe, sans citer le nom d’un seul de ses membres. Il faudra attendre 1951 pour qu’un deuxième article, intitulé « Pages de gloire des 23 », sorte et pour que « le poète du BP », Aragon, écrive Manouchian, en ajoutant certes sa touche patriotarde aux derniers mots écrits par Missak à sa compagne, censurés de 1946 à 1965 de leurs allusions aux trahisons. Est-ce un hasard si, cette année-là, un Comité Manouchian, indépendamment du PCF, s’était mis en place et obtiendra une rue dans le XXe ?

INTERNATIONALISTES DONC TROTSKISTES ?

Après la Libération, une partie des survivants sont repartis dans leur pays pour construire ce qu’ils pensaient être le socialisme. Beaucoup, comme les anciens des Brigades internationales ou des maquis, ont connu la répression stalinienne. Certains même ne quitteront un camp que pour un autre. Le spectre d’une résistance dynamique, sociale, anticapitaliste, échappant aux accords de Yalta (imposés par les impérialismes vainqueurs), mais aussi celui du titisme — qui mènera à l’élimination politique du PCF, entre autres, de Guingouin (responsable des maquis du Limousin), puis de Marty et de Tillon (chefs des FTP) — est un angle d'éclairage pour comprendre l’interrogatoire d’Arthur London. Ce dernier, premier responsable des FTP-MOI, interrogé à Prague en 1951 par ses procureurs staliniens, s’entend demander d’avouer que la MOI était une « section de la Quatrième Internationale trotskyste. » Il est vrai que le mécanicien arménien Arben Dav'tian, bolchevik en Géorgie en 1917, garde rouge puis officier commissaire politique dans l’Armée rouge pendant la guerre civile, exclu ensuite puis déporté comme membre de l’Opposition de gauche, qui s’évade en Iran en 1934 sous le nom de Manoukian, rejoint ensuite, sous le pseudonyme de Tarov, le groupe russe qui travaillait à Paris avec le fils de Trotsky, avant d’être recruté pour son groupe, en 1942, par Manouchian qui n’ignore pas son passé. « Il faut penser également à Manoukian qui meurt avec moi », écrit-il à sa belle-soeur, deux heures avant l’exécution. En août 1943, une note de la section des cadres aurait avisé la direction du PCF que Manouchian était de tendance trotskyste. Confusion de noms ? Quoi qu’il en soit, ils étaient « des nôtres ».

 

Jean-Pierre Debourdeau

1. Cité par le colonel-président du fameux "procès".
2. Comme le note ironiquement Maurice Rajsfus.
3. Lise London.

Rouge n° 2052 du 19 février 2004

(Hebdomadaire de la Ligue communiste révolutionnaire)

 

Nota :  Je n'hésite pas un seul instant à publier ce remarquable article de Jean-Pierre Debourdeau paru dans Rouge du 19 février 2004. Celui-ci a le mérite de nous rappeler comment le PCF a su si bien nourrir le mensonge et alimenter le révisionnisme sur l'histoire de la Résistance. Il fallait absolument que la Résistance fût française, Manouchian, Rajman, Bancic..., autant de noms qui résonnaient mal aux oreilles "patriotardes" des thuriféraires du stalinisme.

Souvenons-nous donc de ce "n'oubliez pas" ; non, n'oubliez pas comment le PCF a avili Guingoin pendant des années jusqu'à ce que Marie-George Buffet lui rende un pathétique hommage lors de ses funérailles, lui présentant des excuses post mortem au nom de son parti.

Oui monsieur Aragon, vous le disiez vous-même : "Onze ans déjà que cela passe vite onze ans", onze longues années après lesquelles le PCF organisera pompeusement à grand renfort de commémorations la récupération de l'Affiche rouge. Ceux que l'on ne devait pas nommer deviennent subitement des héros, ils ne dérangent plus, ou plus exactement ils servent aujourd'hui d'alibi politique face à la montée de la xénophobie. Après le reniement et la lâcheté, après les insultes et les crimes qui vous donnaient tant d'aplomb, qualifiant d'"hitléro-trotskistes" ceux qui combattaient pour l'Internationalisme et contre la guerre impérialiste, ceux qui sont morts sans haine pour le peuple allemand, vous continuez à visiter l'histoire avec cette insupportable fourberie, pour rester dans l'euphémisme, reniant aujourd'hui, niant même, ce dont vous êtiez si fiers hier.

 

Patrice Corbin 

 


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lundi, 30 avril 2007 | Lien permanent

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